Frédérique VIDAL aux 6es Rencontres du G5 Santé
Frédérique Vidal s’est exprimée lors des 6es Rencontres du G5 Santé mercredi 18 octobre 2017 devant une nombreuse assistance.
Je suis très heureuse d’intervenir à l’occasion de vos traditionnelles Rencontres du G5 santé, en tant que ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Cette réunion dans le contexte qui est actuellement le vôtre est sans doute l’un des lieux ou l’association au sein d’un même ministère de ces trois champs d’action prend tout son sens.
Le gouvernement a placé au premier plan de ses objectifs la compétitivité de ses entreprises, et celle-ci passe d’abord par la recherche et le développement, à la fois dans des partenariats académique/Industriel et au sein de vos entreprises. Les industries de santé représentent un secteur de très haute valeur ajoutée pour la France : ce secteur se place au 3e rang pour sa participation à la balance commerciale française avec un chiffre d’affaires de 54,5 milliards d’euros, dont 48 % provenant de l’exportation.
Dans ce secteur d’activité, les 8 industries du G5 (bioMérieux, Guerbet, Ipsen, L.F.B., Pierre Fabre, Sanofi, Servier et les Laboratoires Théa) sont un atout majeur pour la capacité d’innovation et la compétitivité de la France dans l’économie mondiale, car elles ont choisi la France comme plateforme de développement international et qu’elles font de l’effort de recherche en France, une priorité. Votre investissement annuel est de plus de 6,3 milliards d’euros soit près de 15 % de votre chiffre d’affaires et près de 5 points de plus que l’ensemble de votre secteur d’activité.
Je voudrais envisager avec vous aujourd’hui ce qui a fait ce succès, mais aussi ce que nous pouvons faire ensemble pour l’amplifier encore.
Ce succès a d’abord des raisons de fond liées à la place que tient ce secteur d’activité dans notre société et aux mutations qu’il connait.
La santé est l’une des priorités de nos concitoyens et les produits de santé, dont les médicaments, ont contribué aux gains d’espérance de vie, et d’espérance de vie en bonne santé que nous connaissons. L’industrie des produits de santé a transformé le SIDA d’une maladie constamment mortelle en une maladie chronique ; Elle participe, associée à des politiques publiques et à la prévention à faire reculer la mortalité liée au cancer. C’est aussi l’industrie de santé qui a permis le développement de l’une des stratégies de prévention les plus puissantes au service des populations qu’est la vaccination. L’importance que votre activité revêt pour nos sociétés est évidemment une des causes les plus profondes de votre succès. Mais elle n’est pas toujours reconnue et il est nécessaire de le rappeler.
La place de l’innovation dans vos activités a toujours été importante ; Mais depuis le début du siècle, cette innovation est devenue réellement disruptive conduisant votre champ d’activité à reposer non plus principalement sur la chimie fine, la chimie pharmaceutique, la galénique, mais progressivement et de façon croissante sur la biologie, les biotechnologies, et la modélisation numérique. J’y reviendrai.
La mutation d’un secteur majeur de l’économie et au cœur des préoccupations des citoyens a été soutenue par un dialogue constant avec l’État, et par des investissements important de l’État.
Le lieu stratégique de dialogue entre l’État et les industries de santé est sans conteste le comité stratégique de filière des industries et technologies de santé, mis en place depuis 2013 dans le cadre du Conseil national de l’industrie. Cette instance pérenne permet des échanges constants et constructifs, sur la base d’un contrat entre les syndicats représentant les industries et technologies de santé, et 4 ministères dont le M.E.S.R.I..
Ce dialogue régulier est soutenu par une vision stratégique de moyen et long terme élaborée par le conseil stratégique des industries de santé, porté par le Premier ministre. Ces deux instances fonctionnent bien. 2018 constituera un nouveau tournant avec la signature d’un nouveau contrat de filière et la réunion d’un nouveau CSIS et je ne doute pas que les coopérations entre les entreprises de votre secteur et l’État produiront à nouveau des feuilles de route partagées par tous pour le développement de ce secteur d’activité.
À vos côtés, les services de mon ministère mettront leur expertise à la disposition de l’élaboration des mesures de cette feuille de route. Les investissements de l’État dans la recherche en biologie et en santé ont été importants avec près de 2 milliards d’euros dans le programme d’investissements d’avenir.
Ces investissements ont permis des projets partagés avec les industriels, qu’il s’agisse des Instituts hospitalo-universitaires, ou de l’I.R.T. Bioaster. L’appel à projets Recherche Hospitalo universitaire dont nous lancerons prochainement la 4e vague a été spécifiquement centré sur des projets co-construits avec les industriels à potentiel de transfert important et rapide et a concerné 24 projets pour un montant total de plus de 680 millions d’euros et un investissement de l’état de plus de 185 millions d’euros.
La structuration du dialogue entre recherche académique et recherche industrielle a été facilitée par la création à votre initiative d’ARIIS (alliance pour la recherche et l’innovation des industries de santé), en miroir de notre alliance Aviesan. La coopération ARIIS/Aviesan a permis des avancés très significatives comme celle du mandataire unique.
Je veux maintenant envisager avec vous l’avenir.
D’abord, encore, toujours poursuivre nos efforts communs de recherche et de développement. La France s’est fixé pour objectif d’atteindre une dépense intérieure de recherche et développement de 3 % de son P.I.B. et nous n’y parviendrons qu’avec la contribution de tous.
Mais, dans votre secteur d’activité, et du fait des mutations que j’évoquais en introduction, il faut que nous prenions ensemble les mesures permettant un réel virage. La recherche en santé devient de plus en plus multidisciplinaire, faisant notamment une place croissante à des sciences dites plus dures que sont l’informatique et les mathématiques, nécessaires à l’exploitation des données issues des « omiques ». L’État a répondu à ces défis en structurant ces champs, notamment par le lancement du plan Médecine génomique 2025 coordonné par le président d’Aviesan, Yves Levy. Nous comptons sur les industriels pour être des partenaires dans la co-construction de ces nouveaux champs de connaissance.
Enfin nous devons ensemble préparer l’avenir, parfois l’avenir très proche, en développant dans ces secteurs tant la formation initiale que tout au long de la vie. L’évolution vers les biotechnologies de vos activités pose des défis importants de gestion des compétences dans vos entreprises. Le passage à l’échelle industrielle (ou « scale-up ») des procédés dans le domaine des biotechnologies et des médicaments de thérapies innovantes pose des problèmes technologiques spécifiques.
Nous devons identifier avec vous les compétences permettant à nos doctorants d’intégrer vos entreprises et de constituer, comme partout dans le monde, le vivier de vos cadres dirigeants de demain.
Nous disposons dans domaine des biotechnologies de dispositifs de formation de pointe comme les parcours proposés par l’école nationale supérieure de technologie des biomolécules de Bordeaux, ou l’usine pharmaceutique virtuelle du centre de simulation de l’université de Strasbourg. Nous pouvons construire avec vous le continuum de l’acquisition de connaissances fondamentales, au T.P. traditionnel, à la simulation en réalité virtuelle, au stage, à l’activité professionnelle. Enfin vous avez des besoins importants en formation continue, parfois sur site pour une adaptation à une évolution technologique, parfois à l’université pour une évolution plus importante de la qualification de vos personnels. J’ai placé la formation tout au long de la vie parmi les priorités en matière de formation de mon ministère, et incité les universités à développer des solutions flexibles, innovantes, permettant aisément la reprise d’études. Je vous incite en retour à faire appel à nos établissements d’enseignement supérieur pour répondre à vos besoins de formation continue, dans un secteur ou le transfert de la recherche vers la formation est particulièrement rapide. Nous devons probablement imaginer ensemble un partenariat étroit en matière de formation continue qui soit le miroir du partenariat ARIIS/Aviesan en matière de recherche et puisse s’inscrire comme l’une des priorités du futur contrat de filière.
Le partenariat entre l’Etat et votre secteur d’activité, notamment grâce à l’implication des 8 grands du G5 est fructueux. Ses résultats en terme de recherche et de développement sont très significatifs, mais les défis sont immenses et la concurrence mondiale rude. Il nous faut ensemble poursuivre et amplifier nos efforts pour maintenir la place de la France dans cette industrie d’avenir. Mon ministère y est prêt et je sais que vos entreprises le sont aussi. Pour faire gagner la France.